Le naufrage du Comte de Smet de Naeyer - suite (3)

Au cours de mes recherches sur le net j'ai découvert un livre relatant les deux premiers voyages du navire-école belge jusqu'à son naufrage écrit en flamand de l'époque par un cadet. Cela va demander quelques efforts de traduction et en attendant voici un petit supplément de données techniques, de
caractéristiques du navire, et une belle première page d'un journal de l'époque qui publiait à la une le portrait du staff des officiers et des cadets du CdSdN en avril 1906 et la couverture du livre dont je vous parle.

Fiche technique du Comte de Smet de Naeyer:
Chantier de construction : Grangemouth and Greenock Dock Yard and C°, à Greenock Ecosse.
Construit sous la surveillance de M. Dudgeon, de Londres, de M. Cairns, de Greenock, du Lloyd’s Register et du Board of Trade.
Commandé le 2 mai 1904.

Sur cale le 16 juin 1904.
Lancement le dimanche 16 octobre 1904, au bord de la Clyde.

Tonnage, 3.030 tonnes (port en lourd)

Dimensions:

Longueur 80,78 mètres (265 pieds)
Largeur 12,497 mètres (41 pieds)
Creux de 8,50 mètres
Tirant d'eau 6,40 mètres (21 pieds)

Trois mâts d’une hauteur variant de 40 à 45 mètres, à gréement carré en acier à ridoirs à vis.
La mâture est faite de trois parties, le bas-mât, le mât de hune et le mât de perroquet.
Six vergues à chacun des trois mâts.
Voilure de 2.830 mètres carrés de toile.
Dunette de 41 mètres, s'étendant jusqu'à l'avant du grand mât.

Gaillard avant:

Longueur 10 mètres
Largeur 2,40 mètres prolongé de 3,65 mètres

Rouf:

Longueur 12 mètres
Largeur 6 mètres

Divers:
Franc bord de 1,50 mètre.
Vitesse 9 noeuds.

Matériaux acier et bois de teck surmontant le bastingage
Coque, en acier (5 cloisons transversales étanches)
Quatre grandes embarcations de sauvetage avec fargues en teck, un cutter d’exercice de 9 mètres et un canot de service de 6 mètres.
Peinture en blanc (coque, rouf, mâture)
Un treuil à vapeur de la firme Clark Chapman & C°.
80 couchettes métalliques pour les cadets, supperposées deux par deux, de la firme Hoskins & Son Ld de Birmingham.
Provision d’eau potable de 100 tonnes ainsi qu’une machine à distiller pour transformer l’eau de mer en eau douce.
Vers l’extrème-arrière est aménagé le logement du capitaine, le salon du navire et la cabine du premier steward.
Un grand carré réservé à l’état-major et aux professeurs se trouve dans la partie centrale du navire.
Port d'attache, Anvers.

Marraine :
La fille d’Alexandre de Browne de Tiège, principal actionnaire de l’Association Maritime Belge.
Les invités lors du lancement du navire : M. le baron Grenier venu de Londres pour représenter M. le comte de Smet de Naeyer, M. de Browne de Tiège et sa fille la marraine, les représentants de l’armement, MM. Ortmans et A.J. Du Moulin, M.de Kock et Mme de Kock, M. James Reid membre du Parlement, M. Thomas Harvey un des propriétaires du chantier, Mlle Rita Millar, M. Towerlands, Miss J. Cupples, de Grangemouth.

Le début des polémiques concernant la construction du navire, son manque de qualités manoeuvrières et le manque de stabilité du navire :
Le 11 avril 1905 à Bruxelles, alors que le Comte fait route dans l'Atlantique Sud pour ce qui est son premier voyage, deux élus flamands de l'opposition libérale interpellent le gouvernement pour mettre en cause ses choix dans l'organisation de l'enseignement maritime.
Adolphe Buyle et César Van Damme déplorent que le gouvernement subsidie un navire commandé à l'étranger alors que des chantiers anversois proposaient pour une faible différence de prix une construction plus stable et plus solide, avec notamment un doublage métallique du pont supérieur au lien d'un pont en bois seul.
Expert en construction navale (sa famille possède un chantier naval à Termonde), Van Damme critique en particulier les dimensions exagérées de la mâture et des superstructures, qui rendent le bâtiment instable, l'absence de cloisons étanches, et le fait qu'aient été spécifiés, au lieu de ballasts en double-fond, des compartiments verticaux pouvant alternativement servir de cales pour le fret et de ballasts verticaux. Il estime que l'adjudication a porté sur des «plans inexécutables», «tracés par des hommes n'ayant pas la moindre notion d'un navire à voiles» et confiés à un ingénieur britannique «incompétent». Enfin, il s'inquiète qu'à peine livré à Anvers, la bateau ait été hâtivement doté de quilles de roulis et qu'on ait tenté d'améliorer son étanchéité en coulant du ciment sur des tôles et des briques entre les membrures.
L'anticlérical Adolphe Buyl note qu'il conviendrait de s'assurer que les cadets en formation aient une bonne pratique du néerlandais (une grande partie des élèves sont originaires de Bruxelles et de Wallonie), l'avenir maritime du pays étant de toute évidence du côté flamand, et estime qu'au lieu d'un aumônier catholique, il eut été plus opportun d'embarquer un professeur de plus. On lui répond que l'aumônier du bord, le père Cuypers, est également chargé des cours de néerlandais.
Et cela n’est que le début d’un combat politique qui va durer au cours de l’année suivante, suite au naufrage du « Comte ».
Une de mes sources principales d'informations est le site suivant sur Internet:
"plenum.be - Belgian Chamber of Representatives - Sessions" où l'on peut lire en son entier toutes les séances de la Chambre des Députés de Belgique, jour après jour, depuis 1844 jusqu'à 1999. Avec les prises de paroles successives, les interventions, les querelles, les débats, concernant tous les événements importants ou pas de l'agenda politique de ces 155 années. Incroyable source d'informations.Je ne sais si cela existe pour la France?